Biographie
Passionnée de poésie depuis l’adolescence, Laurie Bédard a étudié au baccalauréat et à la maîtrise en littérature de langue française à l’Université de Montréal et a d’abord récité ses textes dans diverses soirées de poésie avant de publier une première fois dans la revue Estuaire en 2015. Son premier recueil Ronde de nuit, est paru au Quartanier en 2016. À travers une écriture toujours rythmée, elle privilégie les thèmes de la mémoire du corps et des liens entre les corps, les objets et les lieux. Son second recueil intitulé Les univers parallèles, a été publié au Quartanier en 2021. Elle a fait paraître quelques courts textes dans les pages de périodiques tels que Espace Art actuel, Estuaire ou Bosquet. C’est sur les scènes que la poète adore se retrouver pour donner vie à des textes finis ou encore en chantier.
Entrevue
Dès le primaire, je lisais énormément. Je me souviens avoir passé beaucoup de temps à la bibliothèque de mon école secondaire à fouiller dans les rayons. Je lisais (et lis encore) un peu de tout. Passant du roman à la bande dessinée, du traité philosophique au manifeste écologique. Je me souviens que la poésie n’était malheureusement pas très accessible. Il y avait bien entendu quelques anthologies, de vieux exemplaires de Nelligan, Miron, Anne Hébert, il y avait aussi les poèmes de Pamphile Le May, un poète aujourd’hui presque oublié à partir duquel on avait nommé mon école secondaire, qui s’intéressait pourtant si peu à la poésie. Je me rabattais sur les extraits de textes choisis dans les manuels de français, qui étaient souvent des chansons, dans la portion du plan de cours qui portait sur la poésie et qui était toujours à la fin de l’année. J’avais très hâte d’y arriver et souvent, en cachette, j’essayais de les apprendre par cœur.
Au secondaire j’écrivais des poèmes d’amour qui rimaient et qui contenaient toujours tous les clichés possibles. On se les lisait entre amis. Ils se ressemblaient tous. Chez moi, en cachette, j’avais toujours un cahier Canada spécial qui était caché dans un de mes tiroirs et où j’écrivais des textes que je ne montrais à personne. J’en noircissais beaucoup. Un soir que mon père faisait du feu dans le foyer j’ai tout jeté dans le poêle. Il m’a dit « tu vas le regretter un jour » et c’est vrai que je serais curieuse de lire aujourd’hui ces textes qui pour moi, à cette époque, me semblaient beaucoup trop intimes. C’est au cégep que j’ai recommencé à écrire de la poésie. J’étudiais en arts plastiques au Vieux Montréal et je détestais produire ces textes qui doivent accompagner les œuvres, alors j’écrivais à la place un poème qui abordait les mêmes thèmes que j’avais travaillé en peinture ou en sculpture. Mes professeurs me laissaient faire parce qu’au final, je crois que ça donnait un bon résultat. C’est là que je me suis dit que je pourrais en écrire pour vrai.
Je crois que c’est d’abord beaucoup d’observer le monde dans lequel on évolue. D’en prendre des notes. Ensuite il faut organiser ces notes en un plus petit monde qui nous parait plus vif, où les choses parlent d’elles-mêmes, où elles sont montrées à la loupe et liées ensemble. Ensuite il faut réécrire. Beaucoup réécrire.
J’aime beaucoup le poème « C’est moi-même, Terreur, c’est moi-même », d’Aimé Césaire. Je me reconnais dans cette violence du corps mêlée à celle des éléments de la nature. Je trouve son rythme enivrant et son propos rassurant, bien qu’à la fois terrifiant.